Dans le contexte
actuel, il est intéressant de comprendre comment le Peer to Peer et l’accès
facile au contenu musical impacte le spectacle vivant, et les modèles
économiques de la filière musicale :
Selon Alan Krueger,
économiste à Princeton dans son étude intitulée "Rockonomics", la hausse des prix des concerts a été plus rapide que
celle de l’ensemble de biens et services, et même que le prix des autres formes
de spectacles : ainsi sur la période 1996 à 2003, le prix moyen d’une
place de concert aux USA augmentait de 81% lorsque l’indice général des prix ne
croissait lui que de 17%
Plusieurs explications
possibles :
1) L’argent qui n’est
plus dépensée en CD pour découvrir un artiste, avec le téléchargement gratuit
sur les réseaux de Peer to Peer, est reportée vers les concerts ou les
festivals, augmentant le prix des places de ces derniers.
2) Les concerts servaient
beaucoup autrefois à vendre des CDs, donc le prix des places était sous-évalué
car on comptait sur une source de revenu complémentaire. Selon Krueger, ce
raisonnement est de moins en moins possible avec le développement des réseaux
de Peer to Peer, d’où une réestimation du prix du spectacle vivant à sa juste
valeur, pour permettre à certains artistes de ne vivre que de ça. On appelle ce
phénomène « la théorie de Bowie », le chanteur étant le premier à
avoir affirmé que « You’d better be prepared for doing a lot of touring
because that’s really the only unique situation that’s going to be left », dans le magazine Pareles, 2002.
3) Le spectacle vivant
devient une expérience rare comparée à la musique enregistrée qui coule
comme de l’eau courante sur le web, avec le P2P : musique enregistrée et
musique live seraient liées selon James Surowiecki du New Yorker, l’innondation
de musique sur le net causant la baisse de la valeur de l’une, et augmentant la
relative rareté et la valeur de l’autre.
Pour Krueger, il est
intéressant de noter que les fans de jazz téléchargent relativement peu, et que
le prix des concerts de jazz a très peu augmenté.
De mon côté je rajouterai
mon petit 4) qui je pense tire ses raisons dans les trois points
précédents : la valeur se déporte là où l’émotion (et donc
« l’expérience musicale ») est la plus intense, peu importe le format,
le support, ou la forme du spectacle. Cette valorisation et propension à payer
est dépendante de la proximité affective avec
l’artiste, un concert générant plus de proximité qu’un simple MP3, surtout si
l’on est au premier rang…
Pour comprendre les enjeux autour du spectacle vivant, je vous recommande la lecture du magazine "Volume!", numéro du second semestre 2005, éditions Mélanie Séteun, et plus particulièrement l'article "Quel modèle économique pour les scènes de musiques actuelles?" de Dominique Sagot Duvauroux.
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