Note introductive: Le texte ci-dessous est le premier d'une série de cinq billets décrivant les nécessaires nouvelles technologies politiques, afin de créer une représentation démocratique interactive (et non pas une edemocratie ou un gov 2.0)
Ils sont tirés de mon ouvrage "Egocratie et Démocratie : La nécessité de Nouvelles Technologies Politiques". Bonne lecture !
"Ensuite, la prédictibilité des facteurs externes et internes peut être accrue par une pratique interactive de la représentation. Le modèle des bourses d’échange du secteur privé montre qu’elles peuvent être de formidables outils d’aide à la décision. Il convient de définir au préalable les sujets sur lesquels mettre à contribution les citoyens : une grande cause publique sur laquelle attirer l’attention du plus grand nombre ; un secteur incertain sur lequel les représentants souhaitent collecter de manière continue toutes les informations rentrant directement ou indirectement en compte dans le cadre du sujet ; ou un risque ou danger pour lesquels une adaptation sous forme de bourse d’échange permettrait de disposer d’une veille très réactive via les fluctuations des valeurs[1].
La valeur ajoutée de prédictibilité de ces dispositifs prospectifs n’est plus à démontrer. Les marchés financiers, qui en sont une forme, l’ont montré maintes fois par le passé. James Surowiecki explique ainsi comment, suite à l’explosion de la navette Challenger peu après son tir de Cap Canaveral le 28 janvier 1986, les marchés financiers ont réagi immédiatement en sanctionnant les sociétés qu’ils jugeaient fautives[2]. Quatre entreprises susceptibles d’être à l’origine de la défaillance technique ont vu leurs cours chuter dans les quelques dizaines de minutes suivant l’accident. Au bout de vingt-quatre heures, seule l’action de Morton Thiokol, qui fabriquait une partie du réservoir central d’essence, avait connu un réel effondrement. En parallèle, il ne fut émis aucun communiqué impliquant l’entreprise, et les articles de The New York Times, le lendemain, relataient des rumeurs de défaillance d’autres pièces que celles de Morton Thiokol. Et pourtant, c’est bien cette action qui a continué de chuter dans les jours suivants, jusqu’à l’annonce officielle, six mois après l’accident, de leur responsabilité. Autrement dit, « moins d’une demi-heure après l’explosion de la navette, les marchés financiers savaient quelle entreprise était responsable »[3].
Cette prédictibilité sous forme d’équilibre à trouver en intégrant un maximum de facteurs dans l’évaluation nécessite deux éléments démocratiques importants. D’abord il est nécessaire que les représentants s’assurent de l’objectivation possible de la valeur ou de la réponse à la question estimée. James Surowiecki confirme que dans le cas de l’explosion de la navette Challenger, les marchés financiers n’ont pas cherché à enquêter en déployant une méthode inédite, mais que « ce qui c’est passé ce jour-là fut qu’un grand groupe d’individus dû répondre à la question “quelle part de valeur ont perdu ces quatre entreprises maintenant que Challenger a explosé ?” qui dispose d’une réponse objective »[4]. L’évaluation quantitative est une des formes de traduction d’un problème permettant de mobiliser plus efficacement les collectifs d’individus afin de trouver une réponse. Ensuite, il s’agit de s’assurer que les conditions de fonctionnement optimal de ce type de marché soient remplies : diversité des opinions des participants, indépendance des uns par rapport aux autres, décentralisation pour que chacun apporte ses connaissances locales, et un dispositif d’agrégation pour consolider les appréciations personnelles en jugement collectif[5].
Les leviers de motivation permettant de regrouper et fédérer les futurs participants de ces marchés prédictifs peuvent se trouver dans différents registres, déjà éprouvés par les entreprises : incitation monétaire, notamment pour que la prédiction sur laquelle ils peuvent indirectement avoir prise se réalise ; incitation éthique à participer et à aider à la communauté à mieux anticiper certains risques intérieurs ou extérieurs au système ; enfin motivation réputationnelle en récompensant les individus qui ont le mieux estimé la probabilité qu’un fait ou qu’une action se réalise.
[1] (340) Il s’agit de ne pas reproduire, par exemple, l’erreur d’une bourse des risques terroristes, expérimentée par des chercheurs américains, et dont le but était de permettre d’arbitrer une valeur indexée sur le risque d’une attaque terroriste aux État-Unis. Cette bourse ne vit jamais le jour officiellement, en raison de probables « délits d’initiés », c’est-à-dire de terroristes poussés à l’acte pour empocher des gains sur une valeur dont ils détiennent des parts."
[2] (341) James Surowiecki, op. cit., p. 7 à 11.
[3] (342) James Surowiecki, op. cit., p. 8 (traduction libre de l’auteur).
[4] (343) Op. cit., p. 9.
[5] (344) Ibid.
L'incitation monetaire s'avererait etre positive si tant est qu'elle pourrait permettre, comme l'explique l'article, de prevoir les fluctuations des marches et en consequence preserver l'avoir et les gains.
Rédigé par : les options binaires | 26/06/2012 à 14:51