Voici quelques réflexions sur le rôle que peut jouer l'interactivité avec et entre citoyens dans la vie publique locale et nationale. Il s'agit d'une libre retranscription des échanges fructueux que nous avons eus avec Arnaud Rayrole d'USEO
Alors qu'on peut voir, à l'approche des élections régionales, que de plus en plus de partis embrassent les réseaux sociaux (comme par exemple l'UMP avec les créateurs de possibles ou encore le PS avec coop-pol à venir), que peut-on réellement attendre de l'interactivité hors période électorale ? en effet, si Barack Obama a été un candidat "interactif et participatif", l'est-il encore en tant que président? l'interactivité et le dialogue dont font preuve les hommes politiques ne sont-ils voués qu'à être cantonnés à la période de campagne? quel valeur ajoutée peut-on en attendre hors campagne?
Les collectivités locales ont souvent besoin de régler des problèmes locaux, dont la principale difficulté réside à trouver une solution consensuelle. A ce titre, une plateforme de dialogue inter-habitants sur des sujets précis, animée par un agent ou représentant de la collectivité (ndlr: se pose la question de trouver le bon agent capable et autorisé à parler sur les forums au nom de la collectivité), permettrait des débats et échanges d'idées pouvant:
1) resserrer les liens entre voisins et habitants du même quartier/ou de la même commune ==> se pose la question de l'identité avec laquelle les gens contribuent: pour que des ponts se tissent avec le réel, il faut un minimum de lien avec la vraie identité (photo, nom, ou encore adresse)...mais commenter avec sa vraie identité est un frein dans bien des cas.
2) faire émerger une meilleure solution ==> Arnaud Rayrole confirme que dans son expérience professionnelle "sur le dialogue citoyen", notamment pendant le CPE, il a pu observer que les meilleurs arguments finissaient par l'emporter : dans le sens où les arguments les plus robustes avaient une durée de vie plus longue, étaient repris, et "traversaient" les forums. Ils n'apparaissaient pas dès le début, mais étaient bien le fruit d'échanges et d'argumentations montant petit à petit le niveau des discussions
3) mettre en place les conditions de l'émergence d'un consensus: l'échange, à défaut d'y arriver tout le temps, donne les moyens techniques et met en place les conditions pour essayer de faire émerger un consensus entre les différentes parties prenantes
4) la démocratie est un processus, pas un état de fait: ce genre de fonctionnement, même si au bout du compte c'est l'élu qui tranche, permet de mieux se conformer à l'impératif démocratique établi par notre société
Les exemples de ce style sont (trop) rares dans le domaine public au niveau local pour vraiment pointer du doigt une bonne expérience totalement réussie (j'en citerai quand meme quelques unes dans un prochain poste étayant l'étude d'USEO sur le dialogue citoyen). Par contre, au niveau national selon Arnaud Rayrole, la concertation "ma-tele-publique" a plutot bien marché. Il est intéressant de noter que ce sont à ce jour les élus les plus éloignés "du peuple" qui ont le plus besoin d'outils de concertation et de remontée terrain (voir forum.gouv.fr par exemple). Dans l'univers marchand, on pourrait aussi citer "vous et la ratp" qui a mis sur pied les infrastructures d'une bonne concertation.
Il est intéressant de noter que le processus interactif décrit ci-dessus a une vocation différente de la mise en branle de la sagesse des foules telle que décrite dans wikinomics et smart mobs par exemple : en effet, selon Arnaud, il est très rare que ce genre de débat à l'échelle locale fasse apparaitre une solution imprévue ou totalement originale. Par contre, sa valeur réside dans le processus de débat et d'échange.
On peut imaginer par contre, au niveau national et pour des problèmes complexes (car de grande envergure, ou multi-sectoriels par exemple), que la valeur d'une plateforme d'interaction citoyenne soit plutôt dans l'alchimie des multitudes, sur le modèle de l'open innovation du secteur privé.
A suivre dans la pratique !
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